Au coeur d'un no man's land, civilisation anéantie par la bombe nucléaire, « guerre ou explosion de Gravelines ? », un théâtre dévasté. Sur le plateau, au milieux des lambeaux de grands classiques théâtraux, une femme, A, qui a résisté, depuis on ne sait plus combien de temps. Un homme aussi, H, yes2.JPG« pour repeupler », comme mort. yes.jpeg

 

 

 

 

 

 

Une jeune femme, B, la rejoint, qui ne sait rien. Ensemble, l'ancienne, et la jeune, « essaient de reconstituer de la mémoire », dans une langue réinventée, primaire et sophistiquée : « sur fond catastrophique, Marguerite Duras s'est amusée à saboter la grammaire ! Une résonance curieuse et drôle du texte. » Celle qui nous en dit plus, c'est Brigitte Mounier, directrice de la Compagnie des Mers du Nord, qui avait depuis longtemps envie de mettre en scène ce texte de Duras. Et on cerne vite pourquoi : ces deux grandes dames montrent une sensibilité commune, pour les mots, pour les causes à défendre aussi. Un texte qui parle beaucoup à notre metteure en scène, l'histoire se passe en bord de mer, peut-être cette mer du Nord que Brigitte aime tant, l'explosion nucléaire de la pièce trouve aussi une résonance particulière à côté de quatorze sites seveso, et d'une centrale, « une zone où l'on vous distribue des dérisoires pastilles d'iode... » Une histoire semblable à Brigitte, sombre dans les problématiques évoquées, mais aussi emplie de luminosité, d'espoir, « écrite en 68, cette pièce est pacifiste et optimiste, elle n'a de noir que ce passé qu'elle cite. Ça parle d'amour, d'amour maternel, avec une morale darwinienne ! » Citation de Laure Adler  : « Duras, ça parle en nous, souvent, secrètement. Marguerite, née d'une mère institutrice à Dunkerque, petite fille sauvage et maigre que les bourgeoises de Saïgon regardaient envieusement tant elle brillait en orthographe et en grammaire, n'a cessé par la suite de malmener notre langue, d'en perturber les règles, inventant un univers où les mots et leur place dans la phrase conduisent le plus vite et apparemment le plus simplement du monde à la pureté du sens. »