Sortir Toulouse Midi-Pyrénées : « Danses et Interculturalité, un enjeu politique et artistique » : le thème de cette nouvelle édition fait écho au 50ème anniversaire de la décolonisation française en Afrique. Un festival engagé, c'est l'esprit de Danses et continents noirs ?

James Carles : Oui, définitivement oui ! Danses et Continents Noirs est la synthèse de plusieurs parcours : mon parcours de militant de toujours, et mon parcours d'artiste et de chercheur. L'aspect engagé va de soi, finalement. Mais le public a le choix : il peut choisir de n'avoir qu'un regard purement artistique, ou alors un regard un peu plus fouillé.


S. : La danse est parfois perçue comme un art peu accessible, le public n'ose parfois pas aller vers cet art dont il estime ne pas connaître les codes, les références. Espérez-vous gommer cette appréhension en multipliant les formes de rencontre avec le public ?

J. C. : Absolument. C'est vraiment un constat qui s'est imposé. Il y a en plus une autre dimension, lorsque l'on aborde un sujet aussi subtil et ambigu que le nôtre. L'idée a donc été de démultiplier les moyens, les acteurs, les actions, les partenariats aussi, pour être au plus proche des gens. D'abord pour partager, mais aussi pour expliquer la démarche. Le public ne sera vraiment présent que s'il la comprend. En danse, les publics sont très variés : vous en avez qui vont intellectualiser, et d'autres qui voient tout cela de manière totalement festive. C'est important de parler à tous ces publics-là.


S. : Cette année, outre la présence de compagnies prestigieuses, la cerise sur le gâteau est donc la présence de la compagnie Alvin Ailey II.

J. C. : Effectivement ! C'est un projet que nous avions évoqué avec Odyssud dès la première édition du festival, mais que nous n'avions pas pu réaliser. Et puis il y a eu une opportunité cette année, la compagnie était en tournée en Europe à cette ces périodes-là. Odyssud a pris contact avec eux, et est revenu vers nous pour nous demander si le projet nous tentait toujours. Évidemment, nous avons dit oui ! D'autant plus que je viens de cette école, c'est donc un coup de coeur personnel !


S. : Le maître mot du festival semble être la diversité : diversité des styles de danse et diversité des événements. Cette volonté de diversité renvoie-t-elle à l'interculturalité évoquée dans le thème ? Le fond et la forme se rejoignent, finalement.

J. C. : Absolument ! Aujourd'hui, j'ai un peu de mal avec le mot « diversité »... Il est hyper-employé, très politisé. La diversité, c'est flou, on met tout et n'importe quoi dedans. Le concept d'interculturalité me paraissait plus juste parce qu'il est beaucoup plus précis. Je pense que la question centrale est vraiment là. Comment vivre ensemble, comment rassembler toutes ces mémoires, qui appartiennent à une seule nation, et les vivre de manières multiples ? Ce n'est pas toujours facile au quotidien. C'est donc important de mettre le doigt dessus. Moi, ça fait plus de vingt ans que je travaille dessus. Danses et Continents Noirs, ce n'est pas un coup médiatique dans l'air du temps : c'est un vrai projet.