Deux ouvrages qui parlent de fuite, d'adaptation à un nouveau pays, pour survivre, des souvenirs qui s'accrochent, d'amour perdu. Deux personnages quittant les pays de l'Est, pour échapper à la répression sous Ceausescu ou à la pauvreté de la Russie d'aujourd'hui.
Mona a 17 ans, nous sommes en Roumanie, en 1977. Elle passe ses vacances dans les Carpates, où elle tombe follement amoureuse de Mihai. Premier amour passionné. La jeune étudiante de Bucarest fait des aller-retour dans le village de montagne, pour vivre cet amour flamboyant, assombri par la suspicion qui règne alors : qui est du côté de la répression de Ceaucescu, qui est dans la résistance ? Le père de Mona est du combat, et, sous la menace, la jeune fille doit bientôt fuir, vers l'Italie, puis les Etats-Unis. D'où le titre du roman, Un train pour Trieste (Belfond, 20€)... Le drame : elle n'a pu dire au revoir à son amour des Carpates, ni réellement savoir de quel côté il était, et cette pensée va la hanter toute sa vie. Par ce premier roman brillant, quelque peu autobiographique, Domnica Radulescu nous fait ressentir les odeurs et les lumières, les angoisses et les doutes de Mona. Sensoriel et sensuel, le roman instaure une tension, répression en Roumanie, arrivée mouvementée aux Etats-Unis, tourments de l'amour perdu, éclaire aussi ce que vivaient les Roumains à cette époque.
Lev, lui, vient de Russie, sa femme a succombé à la maladie, au chômage, il doit partir pour assurer la subsistance de sa petite fille, et de sa mère qui prend soin d'elle. Le voilà dans un car, direction Londres. À l'arrivée, déboussolé, quelques maigres économies et une bouteille de vodka dans son sac, il va devoir s'adapter. Il trouve un logement, distribue des prospectus, puis devient serveur, n'oubliant pas d'envoyer régulièrement de l'argent en Russie. Avec Retour au pays (J'ai lu, 8,40€), Rose Tremain éclaire subtilement le parcours d'un immigré : choc des cultures, passage de ce petit village enneigé empreint des décombres du communisme à la capitale mouvante et fourmillante d'un pays depuis longtemps capitaliste, que notre héros, naïf et mélancolique, ne connaissait que par les cartes postales, et tristesse d'être loin de ses proches, Lev se remémore ses souvenirs avec son ami Rudi, pense à sa petite fille qui grandit sans lui, essaie de surmonter le terrible deuil de sa douce épouse. Avant un retour au Pays ?
